Hommage

Père Pierre Romieu

En l’église Saint-Matthieu de Laguiole, samedi 15 juin, le diocèse rendait un dernier hommage au père Pierre Romieu décédé le 11 juin.

Pierre n’est pas tombé du ciel, ce n’est pas un prêtre hors-sol. Un prêtre est enraciné dans une terre, dans un village où chacun agit ou réagit selon sa sensibilité, sa personnalité. UN prêtre n’est pas en bois.

J’ai connu Pierre quand je suis rentré au grand séminaire de Rodez. J’étais en cycle « Philo » et lui rentrait dans le cycle « Théologie » avec sa promotion qui revenait d’Algérie. Les anciens évoquaient déjà à table ou dans les temps de loisirs, les terribles peurs, les tragédies ou les moments heureux vécus là-bas avec les copains. Cela explique pourquoi Pierre était un fidèle de la Fnaca.

Les études au séminaire sont aussi marquées par ce temps du Concile. Il était une ouverture très grande de l’Église sur les « joies et les peines du monde ». Au grand séminaire, nous étions très sensibles aux drames que vivaient les familles lorsque les mines de Decazeville ont fermé. En 1964, dans ce contexte très dur, Pierre, jeune prêtre, accompagnera des équipes de la Jeunesse ouvrière catholique (JOC). Ou de l’Action catholique ouvrière (ACO). Quels signes d’espérance, quel avenir, l’Évangile peut-il apporter ? Pierre parlait souvent de ces années à Decazeville où il travaillait avec André Jarlan, qui sera assassiné au Chili (NDLR :  originaire de Rignac, le prêtre missionnaire aveyronnais a été tué par la police dans le quartier populaire de la Victoria de Santiago du Chili lors d'une manifestation contre la dictature d'Augusto Pinochet le 4 septembre 1984. Nous célébrons cette année le 40ème anniversaire de sa disparition).

En 1970, je retrouve Pierre à Millau, envoyé à la paroisse du Sacré-Cœur, et moi, aumônier des lycées et collèges. Nous avons collaboré dans ce cadre scolaire. L’équipe des prêtres lui confie alors les paroisses voisines de Laroque-Sainte-Marguerite et Pierrefiche-du-Larzac. Et lorsque les paysans renverront leur livret militaire, il se joindra à eux comme des dizaines d’autres, en solidarité pour exprimer leur opposition au projet d’extension du camp militaire. Pendant les dix ans de lutte, il sera toujours présent, comme les deux évêques de ces années-là, Mgr Ménard et Mgr Bourat.

Toujours à cette époque, en 1970, Millau tombe dans une crise de la ganterie et de la mégisserie : fermetures d’usines ou d’ateliers, chômage, précarité. Pierre accompagne des équipes ACO. Il retrouve des situations analogues à celles de Decazeville. Il va sans dire que, dans ce contexte, la lecture de l’Évangile et la prédication prennent une autre dimension : le sens de la vie, la justice, la paix, la fraternité. En dix-huit ans, à Millau, il a marqué son passage.

Ensuite, il est nommé curé de Saint-Cyprien et Noailhac le 17 juillet 1988. Il y restera cinq ans.

Puis curé de Villecomtal, en juin 1993, pour seize ans. Dans ce monde rural, il a suscité des responsables en pastorale qui dynamisaient le secteur avec le mouvement Chrétiens dans le monde rural (CMR).

Le 28 juin 2009, il devient auxiliaire du doyenné La Montagne-Vallée d’Olt. Malgré une santé devenue fragile, il s’est mis au service de la mission universelle de l’Église. Beaucoup ont apprécié ses compétences dans la réalisation de montages photos en présentant le parcours du diocèse. L’un de ces projets était sur la vie et la mission d’André Jarlan en Aveyron et au Chili. Il y a un an, Pierre nous convoquait pour fêter ses soixante ans de sacerdoce. Aujourd’hui, il nous convoque pour fêter sa rencontre avec André et le Christ ressuscité, dans la gloire de Dieu. 

Père Robert Mazeran

En quelques dates

  • Né le 13 janvier 1937 à Vitrac.
  • Ordonné prêtre le 30 mars 1963.
  • Vicaire à Decazeville le 12 juillet 1964.
  • Membre de l’équipe du Sacré Coeur de Millau le 6 septembre 1970.
  • Membre de la nouvelle équipe de Millau le 29 juin 1980.
  • Curé de Saint Cyprien et Noailhac le 17 juillet 1988.
  • Nommé curé de Villecomtal et des paroisses qui en dépendent le 27 juin 1993.
  • Nommé curé de la paroisse Saint Jacques Dourdou et Dazes le 7 janvier 2001.
  • Nommé doyen du Vallon le 7 mars 2001.
  • Nommé prêtre auxiliaire du doyenné Montagne Vallée d’Olt en résidence à
  • Laguiole le 28 juin 2009.
  • De 2009 à ces derniers jours, a su mettre ses compétences dans la réalisation de montages photos en présentant le parcours de missionnaires du diocèse et soutenir ainsi le service de la Mission universelle.
  • Décédé le 11 juin 2024 à Rodez

Homélie du père Jean-Luc Barrié

Le livre des rois nous offre 2 belles figures de prophète de points Eli et élisé. Tous 2 ont connu, à cause de la mission qui leur a été confiée, de parler au nom du peuple de Dieu et oser dire ce qui n'était pas en accord avec son projet. Tous 2 ont connu, face à l'échec et on rejet, des doutes, des remises en cause, des moments de désespoir.

Quel est le croyant, éducateur, parents, prêtres qui n'a jamais connu de tels sentiments ?

A chacun, le seigneur répète : "Que votre cœur ne soit pas bouleversé. Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi."

Nous ne pouvons nous laisser gagner par la peur, les doutes ou le découragement parce que Jésus est le chemin, la vérité et la vie.

Il est le chemin qui nous conduit au père, c'est-à-dire à la joie absolu de vivre en communion totale avec lui, tant sa gloire et sa paix éternelle. En essayant de marcher de notre mieux dans ses pas, nous avançons jour après jour, assaut école, vers la sainteté, vers l'épanouissement totale de notre personne en sa gloire éternelle. C'est cela être disciple, marcher dans les pas de jésus, nous nous mettre à son école, avec nos limites et nos défaillances, Mais dans la confiance qu'il ne nous abandonnera jamais. Et qu'il veut se faire plus proche, plus intime à nous-mêmes que nous-mêmes comme le dit saint Augustin.

Il est la vérité. C'est lui qui donne sens à notre vie quotidienne, qui nous donne de voir en chacune et chacun une sœur et un frère, en qui il se révèle à nous, un être à aimer comme il nous aime. Il est la lumière qui nous permet de comprendre sa parole comme s'adresser À notre actualité et nous révèle la volonté du père pour aujourd'hui. Il est la lumière qui éclaire nos choix, nos paroles et nos actes pour que nous soyons ces prophètes courageux et bienveillants, tendres et doux mais aussi en dire la parole de vérité qui nous a confiés.

Il est la vie, cette vie divine qui nous est donnée dans les sacrements, cette force de vie et d'amour qu'il nous donne en abondance, qu'il nous invite à accueillir et à faire fructifier pour que son royaume de paix, de justice, de frais Unité universelle grandisse par nous, autour de nous et dans le monde.

Pierre Romieu, ayant donné sa vie au Seigneur, viscéralement attaché au concile vatican de a essayer tout au long de son ministère de porter cette parole de vérité. Une parole qui est douce est réconfortante mais aussi parfois acérée comme deux lames à deux tranchants comme le dit saint paul. Un ami commun me disait qu'il l'admirait chez pierre son courage. Le courage d'une parole engagée, une parole qui parfois dérange. Il a été un pasteur qui a donné le meilleur de lui-même, il a été un confrère avec lequel nous avons eu plaisir à travailler. Pour beaucoup il est reste un ami, un frère avec qui nous resterons unis dans la prière.

Ce matin ne soyons pas bouleversés. royons en Jésus qui dit à son fils, à son prêtre : "Pierre ta place est préparée, viens auprès de moi, demain là où je suis."

Une vie donnée

Dans le récit de ses souvenirs qu'il avait rassemblés il y a quelques années pour sa nièce claire, pierre décrivait ainsi son enfance 2.s ouvrés des guillemets l'histoire de l'enfant que j'ai été me revient dans la mémoire petit à petit. Ce vécu dans une famille de paysans pauvres, dans un village marqué par des traditions religieuses figées par un cléricalisme très conservateur, avec la période politiquement difficile de la guerre 3945, tout cela a influencé ma découverte progressive du monde.

Pierre est né au Viala le 13 janvier 1937, un jour de neige, vingt-deux mois après le mariage de ses parents à Laguiole. Sa mère, Marie, était la fille de Pierre Bringuier, boucher au faubourg, et son père Georges, le fils d'Auguste Romieu, agriculteur et charron à Védrines.

Pierre avait gardé des souvenirs précis des années de guerre et en particulier de la présence du maquis au Viala pendant l'été 1944, où des enfants réfugiés étaient parfois accueillis dans le village où les alentours.

A cinq ans il fait sa première rentrée à l'école de Vitrac. Il parcourt à pied, avec son cousin Henri, les deux kilomètres qui y mènent, par tous les temps. L'apprentissage de la lecture le passionne et dès qu'il peut, il commence à dévorer tous les livres auxquels il a accès. Octobre 1947 : à 10 ans, pour son entrée au CM 2, c'est un déchirement : il se retrouve en pension au collège d'Espalion où il va rester jusqu'en première, avant d'aller passer sa terminale et son bac philo au grand séminaire Rodez en 1955. Finie la vie simple et champêtre qu'il menait au Viala : ce sont pendant sept ans des journées rythmées par un programme immuable entre 5h45 et 20h00. Quinze jours de vacances à Noël, douze jours à Pâques, et trous mois de grandes vacances. Comme il l'écrivait dans ses mémoires, "Je ne suis pas du tout nostalgique du collège. Je m'aperçois que dans le cadre rigide où quelques évolutions se manifestaient, grâce à l'honnêteté d'un tel, à l'ouverture d'esprit de celui-là ou à la bonhomie d'un autre, j'ai pu survivre."

De nombreuses années plus tard, à partir de 1998, ils se retrouveront avec quelques anciens, tous les ans, jusqu'à ce que les rangs se classent. Il est difficile de dire si c'est là qu'est né sa vocation de prêtre, mais c'est certainement là qu'il a développé son ouverture d'esprit, son refus de l'injustice et son esprit de résistant.

Trois années de philo au grand séminaire lui permettent de réfléchir sur les grands mouvements de pensée qui animent le monde, d'étudier les écrits de Sartre, Heidegger, ou encore Camus. Et le voilà, jeune séminariste de 20 ans, envoyé en Algérie pour son service militaire. Il aura de nombreuses affectations, restera 2ème classe car étiqueté antimilitariste, et en reviendra en février 1960. Il gardera toujours en mémoire les cinq derniers mois passés à faire l'école en Kabylie à des enfants avides de savoir, dans des paysages qui lui rappelaient ses montagnes.

Quelques années plus tard, il prendra sa carte à la Fnaca.

Retour à la vie civile, et pour commencer, le voilà bougnat pendant quelques semaines pour aider son cousin Jules à Paris. Puis c'est le retour au grand séminaire où il reprend ses études après trois années de coupure. Pierre sera ordonné prêtre le 30 mars 1963 et, à partir de là, il va être nommé sur des paroisses urbaines puis rurales. Au cours de ces années, il a toujours soutenu les plus humbles et les plus faibles dans ces engagements religieux ou politiques.

Marie-Claire Poulhes et Jean-Paul Franc
neveu et nièce du père Romieu

Moi, c'est Pierre !

Au nom de nos deux paroisses San Guiral et Sainte-Geneviève, père Romieu, nous vous disons un grand MERCI. Oh, pardon, pas père Romieu, mais Pierre Romieu. Vous m'en avez souvent fait la remarque : "Moi, c'est Pierre, je ne suis le Père de personne !"

On comprend votre réaction, en ayant écouté ou lu votre histoire, certains épisodes de votre parcours, comme le Larzac, la guerre d'Algérie, André Jarlan et Joseph Sirvin. Voilà des évènements, des personnes qui vous ont énomrmément marqué". 

Vos engagements étaient soutenus par la fraternité, l'amitié, la solidarité d'une équipe, de frères d'armes et de compagnons de route, et en ce domaine, les titres ne comptent guère. Mais le respect parfois oblige.

Merci pierre pour tout ce que vous avez donné par votre témoignage et dit pour nourrir notre foi. Nous retiendrons vos homélies proclamés avec une maîtrise des mots, du contexte et de l'actualité du moment, avec des conclusions ciselées.
merci pour votre disponibilité auprès du père jean. Dès son arrivée sur la montagne, vous avez su l'accompagner et parcourir avec lui le pays.

Merci d'avoir répondu présent aux attentes de chacun des fidèles de nos paroisses. Malgré vos premiers affaiblissements et vos premiers symptômes de fatigue, vous avez tout fait pour qu'en alternance, nous ayons une messe dominicale dans chaque paroisse et ne parlons pas des dimanches en fait ici ou là !

Merci pour les travaux que vous avez aussi entrepris par passion : à propos des juste du maquis et de votre documentaire sur André jarland que j'ai eu l'occasion de visionner avec vous

Pierre Romieu, encore merci pour tout, reposez en paix et continuer de là-haut à veiller sur nous tous.

Jean-Louis Cromières