Direction de l'enseignement catholique

Les nouveaux locaux inaugurés

et la salle de réunion baptisée "Roger Bou",
clerc de Saint-Viateur et ancien directeur diocésain de l'Enseignement catholique de 1972 à 1991.

Contact

Direction diocésaine
Enseignement Catholique
Aveyron Lot

5 place la mairie
12510 OLEMPS
ddec12-46@ec-mp.org
05 65 73 32 00

Discours de l’évêque de Rodez et Vabres

Madame le Maire d’Olemps — priorité au local…,
Monsieur le Président de la Communauté de Communes,
Monsieur le Président du Conseil départemental,
Monsieur le Directeur Diocésain de l’Enseignement Catholique,
Monsieur le Président de l’UDOGEC
Monsieur le Président de l’Association Immobilière du Rouergue,

La présence importante de l’Enseignement Catholique dans notre territoire est le fruit d’un travail incessant de fondation et de refondation. A l’origine, des hommes et des femmes laïcs, des religieux et des religieuses, des prêtres du diocèse ont mis sur pied localement des écoles, des collèges et des lycées.

Progressivement, notamment avec la loi Debré du 31 décembre 1959, ces établissements se sont constitués en réseau au niveau départemental et diocésain, dans le respect des liens précieux que nous entretenons avec les autorités de l’État, de la Région, de notre Département et de nos Communes. La figure du Frère Roger BOU, dont notre salle de réunion va porter le nom, dit quelque chose de ce travail aussi colossal que magnifique de mise en réseau de nos institutions locales. Et aujourd’hui encore, l’Enseignement Catholique cherche à répondre aux défis nouveaux qui se présentent, notamment du point de vue de l’éducation et des apprentissages.

La société est en crise et le libéralisme à tous crins génère une société où il ne suffit pas d’être bon mais où il faut être meilleur que l’autre. Dans ce contexte, il est important que des hommes et des femmes croient en l’avenir de la jeunesse. Comme les autres institutions, l’Enseignement Catholique, avec son génie propre, a son rôle à jouer. Au début des années 2000, souvenons-nous, le thème des Assises de l’Enseignement Catholique était « Éduquer, passion d’espérance ».

Il y a là quelque chose de profondément humain et chrétien, qui peut être largement partagé : aimer quelqu’un, c’est croire en son avenir ; aimer quelqu’un, c’est lui donner de l’espace à l’intérieur de soi. C’est ce que l’évêque avec la tutelle diocésaine et les tutelles congréganistes essaie de faire tout au long de l’année. Et c’est aussi ce qu’une des Associations de notre diocèse, dont le Père Daniel BOBY est président, essaie de faire au mieux. Aimer la DDEC, c’est lui donner de l’espace ! Et un bel espace dans une belle commune. Merci, Mme le Maire, pour votre accueil !…

Si le monde et la société changent, l’Enseignement Catholique, lui aussi, est en mutation. A chaque rentrée, les équipes éducatives se renouvellent et, nous le savons, se dépensent sans compter. Le métier d’éducateur ou d’enseignant est un métier exigeant, difficile et passionnant. On peut rendre hommage à tous ceux qui s’investissent dans nos établissements. Les chefs d’établissement reçoivent tous mission de l’Église. Pourquoi recevoir une mission pastorale ? Nous croyons que, dans le contexte actuel, la référence implicite ou explicite à l’Évangile est plus que jamais pertinente. Elle permet de fonder ou de refonder des valeurs essentielles, partagées par beaucoup de nos contemporains : l’égale dignité de chaque personne, la confiance dans les possibilités de chacun, l’attention aux plus démunis, la solidarité, le respect et l’estime réciproques, le sens du pardon, le don de soi, l’intériorité et la vie spirituelle.

Une des forces de notre réseau, c’est son caractère fédératif. Professeurs, éducateurs, chefs d’établissement… : nous avons l’habitude de travailler ensemble. Et cela se reflète aussi dans le système associatif qui supporte nos efforts partagés : depuis le local jusqu’au national, en passant par le départemental et le régional. C’est un réflexe profond de l’Enseignement Catholique. On n’attend pas que l’initiative vienne d’en-haut !  On sait que les intuitions fécondes naissent au contact des élèves, dans les échanges et la volonté de travailler ensemble, en réseau. C’est d’ailleurs l’Enseignement Catholique qui a inventé le concept de communauté éducative. Il l’a inventé parce qu’avant d’être un concept, c’est une expérience et une réalité. Et c’est là que la DDEC a un rôle tout particulier à jouer, comme service des services, si j’ose dire.

Je me suis toujours demandé comment un Directeur Diocésain pouvait expliquer à ses enfants ce qu’il faisait !… Et je crois qu’il en va de même pour tous ceux qui travaillent à la DDEC !… Le caractère fédératif de l’Enseignement Catholique est une belle illustration de la mission reçue par chacun des chefs d’établissement. De la petite école de campagne au grand lycée urbain, l’établissement est la cellule de base de l’Enseignement Catholique. Cela dit quelque chose du sens de la responsabilité des acteurs locaux. Et cela dit aussi quelque chose du service que l’Église veut rendre à la société. Elle le fait le mieux possible, en ayant bien conscience de tout ce qu’apporte de bon le Service Public.

Ce qui fait la force du réseau de l’Enseignement Catholique fait aussi sa faiblesse, même si nous sommes bien soutenus par les communes, le département et la région… Alors, merci à vous, Messieurs et Mesdames les élus, pour le travail que vous réalisez au service de tous les jeunes, dans nos communes et notre département. C’est dans ce contexte qu’il nous faut assumer notre caractère privé sous contrat, à un moment où l’engagement associatif et le don de soi sont souvent fragilisés. Les chefs d’établissement et les équipes éducatives sont confrontés à cette fragilité. Le monde s’accélère, le temps manque et la société du loisir — qui est aussi une société en crise — a du mal à susciter, à porter et à mettre en réseau les engagements individuels. Des professeurs peuvent parfois se retrouver bien seuls devant des problèmes nouveaux. Dans le contexte de réduction budgétaire, nous sommes aussi parfois contraints de mettre en place des entités institutionnelles plus grosses : fermer des petites structures au risque de perdre en proximité… Merci à vous, M. le Directeur Diocésain de l’Enseignement Catholique, pour ces négociations que vous savez mener au niveau régional au profit de notre Aveyron, parce que « vous savez, chez nous, ce n’est pas pareil !… »

Les éducateurs et les enseignants font aujourd’hui face à des défis sans précédent. Certains d’entre eux disent même qu’en quelques années, ils ont tout simplement vu leur métier changer. On parle souvent de « revaloriser » le métier d’enseignant et d’éducateur. Pourtant, quand on y pense, les hommes et les femmes qui vivent au contact des jeunes font un travail qui devrait forcer l’admiration de tous !…  L’Enseignement Catholique est aujourd’hui confronté, comme la société tout entière, à des défis fondamentaux. Et je voudrais m’arrêter rapidement sur trois de ces défis :

- le rapport au temps et à l’espace

- le rapport au savoir

- le rapport à la loi

1/ Le rapport au temps et à l’espace, tout d’abord, est en train de changer.

On est entré dans une société de l’immédiateté, où les durées et les distances semblent s’effacer. On veut tout, tout de suite. On a l’illusion qu’on peut l’obtenir en un clic, sans effort. En même temps, sortis des merveilles de la technologie, les jeunes se retrouvent très vite face à une réalité difficile : il faut trouver sa place, inventer son avenir… Les enseignants et les éducateurs, en lien avec les parents, sont confrontés à un travail d’accompagnement très important. Plus largement encore, on est passé, en quelques années, d’une société de la prescription, qui avait bien des défauts, à une société de la performance, qui en a d’autres, plus subtils.

Quand des éducateurs et des enseignants parviennent à aider les jeunes — les meilleurs et surtout les plus faibles — à se situer avec justesse et humanité dans ce monde-là, ils font un travail admirable. Et je remercie les chefs d’établissement, les éducateurs et les enseignants : sans vous, notre réseau ne serait pas ce qu’il est !…

2/ Le rapport au savoir, d’autre part, est aussi en train de changer.

On n’a plus seulement des calculatrices dans la poche ; avec internet, on a le monde dans sa poche, avec notamment le savoir prêt-à-consommer des encyclopédies participatives. On construit moins son autorité sur notre savoir que sur notre capacité à transmettre une passion et un discernement lucide sur le monde. La DDEC, avec ses ramifications et ses initiatives très heureuses, comme ces deux journées sur le harcèlement, est un lieu-source où l’on peut penser et accompagner ce défi.

3/ Le rapport à la loi, enfin, est en pleine mutation.

Depuis quelques décennies, les réformes sociétales sont l’indice de grands défis anthropologiques, qui sont encore devant nous. C’est quoi, finalement, un être humain ? Notre nature trouve-t-elle son fondement uniquement dans le regard de l’autre, dans le regard des autres ?  Qu’est-ce qui fonde notre dignité ? A-t-elle ou non un fondement transcendant ou dépend-elle de la philosophie à laquelle je me rattache ? Il y a là des questions redoutables, qui nous renvoient au sens de la loi et du vivre ensemble.

Le but de la loi ne peut se réduire à enregistrer des mutations, en définissant des règles qui aménagent la convivence sociale. D’un point de vue éducatif, une telle attitude n’est pas tenable. On ne peut pas non plus se contenter d’une éthique procédurale. Penser et agir ainsi, ce serait renoncer à fonder le sens de la loi et en même temps oublier la présence des plus faibles et des plus fragiles, qui sont une raison de vivre pour l’Enseignement Catholique. Nos établissements rencontrent là un défi majeur : proposer une visée, un idéal ; aider les jeunes à accueillir et à construire leur avenir. Quelle joie pour les enseignants et pour les éducateurs de voir les plus faibles s’en sortir et trouver leur place dans la société ! Le caractère propre de l’Enseignement Catholique révèle ici toute sa pertinence.

Par son expérience du vivre ensemble, par sa tradition pédagogique, l’Enseignement Catholique vit chaque jour l’expérience que la loi est là aussi pour indiquer une direction et une orientation. C’est l’étymologie du mot Torah en hébreu. Les valeurs auxquelles nous faisions référence tout à l’heure peuvent à la fois être partagées très largement et en même temps, pour les chrétiens, elles ont un nom et un visage : celui de Jésus-Christ. C’est une Bonne Nouvelle pour le siècle dans lequel nous vivons.

Je vous remercie de votre attention !

         Luc MEYER, Évêque de Rodez et Vabres